Quand vous pensiez que j’étais mort / Matthieu Blanchin. –
Futuropolis, 2014.
Depuis déjà bon nombre d’années que l’autobiographie
s’invite dans la narration séquentielle, le récit médical finit par en
constituer un secteur aussi peuplé qu’un service d’urgences un soir de Fête de
la musique, au point que la
Sécurité sociale, dit-on, en envisagerait le remboursement.
Ainsi d’innombrables albums et « romans graphiques » ont-ils été déjà
consacrés aux déboires sanitaires de leurs auteurs ou de leurs proches, depuis L’ascension du haut mal de David B,
racontant la grave épilepsie de son frère et ses multiples répercussions
familiales, jusqu’au récent Carnet de
santé foireuse, journal dessiné de Pozla, atteint de la maladie de Crohn. A
la décharge de ces louables tentatives, il faut dire qu’elles placent la barre
assez haut : il ne s’agit pas de raconter son dernier rhume. Mécanisme de
compensation compréhensible de la part de gens dont la vie même se trouve
atteinte à la racine ou bien simple nécessité d’apporter un témoignage
« vu de l’intérieur », il n’est évidemment pas question de mettre en
cause la démarche de tel ou tel auteur, surtout lorsqu’elle fait montre d’une aussi
belle pénétration que celle de Matthieu Blanchin dans cet album. L’homme a de
l’expérience (et pas trop de chance), qui fut d’ailleurs l’un des pionniers du
genre avec Accident du travail (Ego
comme x, 2001). Victime, cette fois, de tumeurs au cerveau qui le plongèrent plusieurs
jours durant dans un coma profond et l’amenèrent aux limites extrêmes de la vie,
c’est tout le ressenti d’un véritable revenant qu’il donne à voir, à travers un
contexte familial compliqué de conséquences multiples mais aussi en essayant de
rendre compte de toutes les nuances du « voyage intérieur », entre
enfer et paradis, que fut cette épreuve, dont nul ne sort tout à fait le même.
Matthieu Blanchin, lui, en est sorti, peut-être meilleur, peut-être plus
heureux de vivre, en aucun cas méconnaissable et, surtout, presque 200
pages d’intelligence à l'appui, en rien diminué.
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