mercredi 10 décembre 2014

La proie




















David De Thuin La proie. - Glénat, 2014

Il y avait Lapinot et les carottes de Patagonie où Lewis Trondheim apprenait à dessiner en 500 pages. Plus tard, il y eut Comix 2000 où, sur 2000 pages sans texte, L'association faisait le tour de tout ce que l'époque comptait d'alternatif et d'underground en matière de bande dessinée. Il y aura désormais La proie de David De Thuin. De l'un, il retient le défi personnel, en doublant la mise (1000 pages et 10 000 cases, ni plus, ni moins), de l'autre cette allure de Gaffiot qui vous pose une bibliothèque. L'histoire tient pourtant en quelques mots : Topuf, un naufragé, est recueilli par Tipôme et Bumble, deux infectes (sic) qui reconnaissent en lui l’Élu, destiné selon l'antique prophétie à transformer leur monde. Pour cela, il leur faudra gravir la Pire-Aînée, suivis de tout un peuple de bestioles enthousiastes ou sceptiques mais qui, toutes, reviendront radicalement changées de leur périple.
Réputé rétif aux façons du petit milieu de la BD, David De Thuin est un auteur hors-norme, alliant un apparent classicisme à une farouche volonté d'indépendance qui l'a fréquemment ramené à l'auto-édition lorsqu'il pouvait facilement prétendre à s'illustrer chez les principaux éditeurs mainstream. Avec La proie, il donne à la fois son Grand Œuvre, un Seigneur des anneaux à hauteur d'élytres et d'antennes et le plus bel hommage qu'il pouvait rendre à Raymond Macherot, son maître, dont il se montre ici le digne successeur. Évidente sur le plan graphique, la parenté l'est aussi dans le ton, volontiers caustique et d'une cruauté native, presque enfantine, qui achève de faire de ce gros livre bleu comme une mouche l'épopée animalière et définitive que les circonstances n'auront jamais permis à Macherot de réaliser à sa guise. 

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