Super-héros : une histoire française / Xavier Fournier. - Huginn & Muninn, 2014.
Il est de tradition de faire du super-héros un phénomène
purement yankee dont l’origine remonterait au Superman de Jerry Siegel et Joe
Shuster en 1938. Or, il n’en est rien : pour peu que l’on accepte une
définition un peu large du vengeur hors-normes, le genre serait bien plus
ancien et pourrait même bien avoir des racines principalement feuilletonnesques
et françaises ! C’est en tout cas la thèse défendue par l’auteur de ce
documentaire très complet qui, partant du Comte
de Monte-Cristo, n’oublie pas un représentant du muscle national, du
classique Rocambole au tout récent Garde Républicain, personnage de
porte-drapeau un rien hallucinant mais pas tellement plus, si l’on y réfléchit,
qu’un Captain America. Certes, la
plupart de ces héros sont bien oubliés : qui se souvient du Nyctalope de Jean de La Hire ? De Fantax, du tandem Navarro et Mouchot,
qui eut un fan-club de 10 000 membres ? Du splendide Atomas dessiné par René Pellos ? Ou
bien, plus près de nous, de Super Boy,
dont les aventures s’étalèrent pourtant sur plus de trente ans ? Loin de n’être
qu’une copie servile de ses cousins d’Amérique, le super-héros français n’aurait
donc pas grand-chose à leur envier, sinon d’avoir pu s’épanouir dans un milieu
favorable. Car jamais nos surhommes n’affrontèrent super-vilain plus
acharné à leur perte que la sinistre Commission de surveillance des
publications destinées à la jeunesse, adossée à la fameuse loi de censure de
1949, d’ailleurs jamais abrogée… D’injonctions en procès, les éditeurs de « petits
formats » (qui furent en somme l’équivalent français du comic book américain) n’eurent de cesse
d’échapper aux rayons de la mort des défenseurs de la Sainte Famille,
sans qu’il leur soit réellement possible de faire exister un univers complet, à
la façon dont, aux USA, la petite maison Marvel finit par tirer son épingle du
jeu et devenir l’empire que l’on sait. Hors quelques parodies célèbres comme Superdupont, l’histoire des super-héros
français ne put donc jamais être autre chose qu’une longue suite de renaissances,
portées par d’inlassables enthousiastes, dont l’acharnement à faire vivre un
genre si généralement décrié par les pédagogues de tout poil confine lui-même au
super-pouvoir et mériterait qu’on lui dédie la création d’un héros spécifique
et 100% français, à l’enseigne de l’increvable Phénix.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Quelque chose à ajouter ?