mercredi 28 septembre 2016

Les rêveries d'un gourmet solitaire




















Les rêveries d’un gourmet solitaire / Jirô Taniguchi et Masayuki Kusumi. – Casterman, 2016

Deuxième service ! On en redemandait : le gourmet solitaire repasse les plats pour une nouvelle série de promenades gustatives à travers les petites rues de Tokyô, Tottori et autres lieux où ça sent bon sur les coups de midi. Car la cuisine japonaise, on l’oublie trop souvent, ne se limite pas aux sushis et s’avère d’une appétissante diversité, même servie par les gargotes à pas cher qu’aime à fréquenter notre représentant de commerce entre deux clients. Oden en soupe à Aoba-Yokochô, cuisine péruvienne à Shinanomachi, râmen au porc et riz à Ôtemachi… chaque plat fait l’objet d’une véritable petite nouvelle où le contexte et les circonstances des découvertes de Gorô (c’est son nom) comptent au moins autant que la sauce qui les accompagne. Et c’est peut-être, au fond, ce qui fait le principal intérêt de ces histoires et les rattache à la même veine pensive et piétonne que L’homme qui marche ou Quartier Lointain, qui, en France, firent de Jirô Taniguchi la star qu’il est loin d’être au Japon (au point que, reconnaissance du ventre oblige, les auteurs se fendent d’un discret hommage au plat préféré des Français : le couscous, savouré en connaisseur par un Gorô de passage à Paris.) Ce n’est donc pas sans raison que le titre français emprunte avec une certaine malice à Rousseau : le gourmet solitaire ne travaille pas seulement des mandibules, il fait aussi marcher sa tête et le cœur suit au fil d’un monologue intérieur qui ne s’achève à chaque fois qu’à satiété complète. De nourritures terrestres en aliments de l’esprit, le lecteur refermera lui-même cet album sur un rot discret, une seule mais taraudante question le laissant sur sa faim : mais comment diable fait donc cet enragé brifaud pour garder la ligne ?

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